Cher Mister Totalitarismo,
Je me permets de t’ennuyer par email.
J’ai lu la traduction de l’article des camarades d’outre-Alpes, résultat d’une situation qui, dans 10 à 15 ans, sera également une réalité en Italie, à condition que des terres désolées comme la Padanie ne se trouvent pas déjà dans ce triste scénario.
Mais en lisant, je n’ai pu m’empêcher de penser que la lucidité de ces unhappy few, une minorité qui, je pense, n’atteint jamais des chiffres supérieurs à quelques dizaines de milliers (au niveau de la conscience active) dans des pays comme l’Italie ou La France, représente aujourd’hui ce que sont, mutatis mutandis, les vétérans de la grande guerre à l’aube du fascisme.
Face à une marée montante d’idioties, à une dévalorisation totale de sa propre identité façonnée dans le sang et les sacrifices au front (certainement pas une promenade de santé), contraints de vivre dans un pays défaitiste et entre les mains d’ignobles affairistes franc-maçons, avec des conditions déprimantes, ils ont compris que n’était plus moment de bavarder et de se décourager.
Ils ont trouvé un Capo, ils ont servi une idée et ont volontairement proposé de se battre et de mourir : qu’était le squadrisme sinon en fin de compte une astuce pour atténuer nos saignements ? Une classique manière masculine de rire de l’ennui et de la sécurité bourgeoise pour connaître l’inconnu, chatouiller la vie et profiter de chaque instant ?
Bien entendu, la distinction fondamentale réside dans un problème fatal : la violence. Mais je veux éviter tout problème, et pur ça je me tais.
Beaucoup de mots, les miens, pour dire qu’en fin de compte la prise de conscience a toujours été l’héritage de quelques-uns, d’élites, noyés dans un océan de insouciants et de paillassons humaines : parce que le nombre est ennemi de la qualité, et les masses sont des femmes par définition : elles poursuivent l’homme gagnant. Aujourd’hui, ce sont eux qui gagnent, les énergiques « notaires » et « avocats » du Congo belge [les Africains débarqué à Lampedusa]. Ce n’est pas un hasard si certaines marches de femmes vont à Lampedusa et non aux chômeurs, tout comme les femmes ont évité les fascistes de la République de Salò après avoir couru après leurs uniformes pendant vingt ans.
Cependant, je ne suis pas d’accord avec l’interprétation selon laquelle les femmes veulent un homme qui décide à la maison : les miasmes du féminisme ont été tellement intériorisés que même dans un environnement extrêmement périphérique comme le sud de l’Italie, dans certains milieux émancipés – femmes diplômées, filles uniques, encore entretenues après l’âge de 25 ans avec des familles distraites et détruites – la femme veut toujours avoir le dernier mot, et en même temps échapper à toute responsabilité et engagement matériel.
Il y a deux générations, mon grand-père pouvait facilement avoir une vie de famille paisible et des amantes infinies, et sa femme acceptait “parce que c’est un homme”, dans une réalité très confortable pour un homme comme la Sicile, où le mâle était littéralement le roi de la maison (il n’est pas nécessaire de lire Vitaliano Brancati pour le comprendre).
Je parle évidemment de mon expérience avec une fille misérable. Mais à mon ami français je rappellerais mon exemple : rien ne manquait vraiment dans ma relation sur le plan matériel et affectif. Ce sont des dynamiques qui en même temps sont extrêmement difficiles à gérer, surtout si l’on considère les névroses latentes dans l’inconscient collectif d’un peuple comme celui du Sud, qui en trois générations (de ma grand-mère née en 1934 à moi née en 1994) est passée de la société préindustrielle à la société postindustrielle, de la pauvreté paysanne à la pauvreté du secteur des services, sans même s’en rendre compte.
Je ne pense donc pas que la solution existe. Nous roulons dans le chaos, essayant en quelque sorte de défendre ce qui est défendable, mais le plan public-social semble désormais complètement compromis.
Andrea Romani
(https://in-otio.blogspot.com/2023/09/ri-presa.html)